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Une rentrée scolaire au Laverq sous protection du ministre

Publié par Marie Christine Duval le mardi 2 septembre 2025

Quand un ministre sauva les écoles du Laverq…du moins provisoirement.

L’inspecteur d’académie avait fait son enquête sur les écoles de Méolans au printemps. Le maire était prévenu : pas question de maintenir les quatre petites classes dispersées dans les hameaux du Laverq, avec si peu d’élèves chacune et dans des locaux insalubres que propriétaires et municipalité entretenaient si mal. A la rentrée scolaire d’octobre 1920 les classes seraient regroupées à Saint Barthélémy et l’Abbaye, les enfants des écoles des Clarionds et du Mas des Gays devraient dorénavant se déplacer.

Les habitants sont affolés à l’idée d’envoyer les enfants si loin sur les chemins de montagne. Jean Roux et Jules Tron, conseillers municipaux, font circuler une pétition qui réunit quelques signatures de pères de famille et l’envoient directement à Monsieur le Ministre de l’Education Nationale et des Beaux-Arts.

Il faut dire qu’à cette date le ministre n’est autre qu’ André Honnorat, conseiller général du Lauzet, député, puis sénateur des Basses Alpes qui revendique haut et fort son origine Allossarde, son amour du département et son souci des hautes vallées…

André Honnorat
André Honnorat

André Honnorat écrit aussitôt à l’Inspecteur d’Académie :

« …Etes-vous allé personnellement dans le Laverq ? Pour moi je me rappelle y être allé en tournée de conférence pour l’Emprunt dans le courant du mois de novembre, l’hiver était très clément et malgré cela j’ai pu constater à quel point la circulation était difficile. Le Vallon est mal orienté, balayé par des tourmentes de neige ; le chemin qui relie les Clarionds à l’Abbaye surplombe en corniche le fond du torrent, et le passage dangereux pour des hommes non chargés est vraiment impraticable aux enfants.

Où les enfants des Clarionds, des Peynier et Tarroux iraient ils donc en classe ? Je ne parle pas de St Barthelemy qui est vraiment trop éloigné.

Si au contraire vous montez au-delà l’Abbaye, ce n’est plus une question de distance qui se pose, mais bien celle qui résulte de la difficulté à franchir l’énorme torrent qui sépare le groupe de l’Abbaye de celui du mas des Gays (les Chastels, les Vieils, le Pied des Prats). Je vous assure que la promenade n’est déjà pas amusante pour un fonctionnaire, y risquer des enfants est vraiment impossible… »

Bien évidemment les petites écoles du Laverq ne fermeront pas cette année-là !

Abbaye école 14 mars 12 68
la petite école de l'Abbaye
Abbaye 14 mars 12 28
abbaye photo lucien
photos Ricou Abbaye

D’après un rapport de l’inspecteur primaire sur l’école du Laverq, les enfants sont enfermés dans une petite pièce humide de 20 m² sous un grenier à bois mal isolé, avec 2 petites fenêtres délabrées d’un demi-m² ; au milieu de la pièce le plancher s’affaisse depuis bien longtemps, sans que personne ne le répare, si un élève trébuche il tombe sur le poêle sans grille de protection. Les toilettes en face, « présentées comme un luxe par le propriétaire », ne sont qu’un trou malsain entre 2 planches…

  André Honnorat sauve aussi la classe de Godeissard, au-dessus du chef-lieu de Méolans, pour la rentrée 1923.

« Je voudrais bien être assuré que l’école de Gaudeissard à Méolans aura une titulaire à la rentrée. Vous savez que le poste est resté vacant cette année… je vous assure qu’il y a là une situation qui ne peut se prolonger sans péril… »

L’inspecteur s’empresse de nommer une institutrice (3 jours après). L’école ouvrira encore quelques années.

ecole gaudeissard albert lebre
L'institutrice et les écoliers de Gaudeissard, dont notre ami Albert Lebre à gauche

 Au bilan d’André Honnorat : la Cité Universitaire Internationale, l’heure d’été, les sanatoriums, la lutte contre la tuberculose, etc… il convient de rajouter l’éducation de nos parents ou aïeux Bas-Alpins.

Mais les ministères ne durent qu’un temps, on le sait !

Une décennie plus tard le nombre des élèves a chuté avec l’exode rural, et les habitudes locales ne se sont pas améliorées. L’inspecteur déplore l’absence totale d’investissement communal, et les mauvaises habitudes des parents qui n’envoient leurs enfants à l’école que lorsque les moutons ne sont plus gardés dehors. A la rentrée 1932 aucun élève ne se présente à l’école de l’Abbaye ; à l’instituteur médusé on explique que c’est comme ça ici et qu’on viendra peut-être le mois prochain.
Bientôt il ne restera plus que 4 élèves, dont 2 fillettes qui atteignent l’âge de 13 ans, maximum pour le primaire ; l’académie ne les acceptera plus, il faut qu’elles aillent au collège. C’est la fin de l’école à l'Abbaye.

Léa Tron et Hélène Barthélémy
Léa Tron et Hélène Barthélémy, parmi les 4 dernières élèves de l'école de l'Abbaye
scan Simone Masse 12 mai 2015- 05
les derniers habitants du Haut Laverq en 1935, familles Barthelemy et Tron , photo famille Masse

Sources : Archives départementales des Alpes de haute Provence cote 1T492

 

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