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Une histoire de garde champêtre

Publié par Marie Christine Duval le mardi 2 avril 2024

Quand le garde forestier verbalisait le garde champêtre…

 En 1850 l’administration forestière avait accordé à Méolans et Revel l’autorisation de couper dans les bois communaux indivis 40 résineux, pour une valeur totale de 60 francs, destinés uniquement aux habitants de ces deux communes pour réparation de leur maison.

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Comme l’exige le code forestier, il avait fallu désigner un responsable de la coupe, qu’on appelait à l’époque un «entrepreneur ».  Les candidats à cette haute responsabilité ne se bousculant pas du tout, c’est finalement Jean Pierre Gilly qui avait accepté cette fonction totalement bénévole, pour rendre service à tous.

A cette date Jean Pierre Gilly feu François, dit « Berard », n’est plus tout jeune, bientôt 70 ans ! C’est un ancien soldat « qui avait suivi Napoléon dans toute l’Europe », et n’ayant qu’une maigre pension il exerce la modeste fonction de garde champêtre au quartier de Saint Barthélémy, très peu rémunérée.

Donc en accord avec l’administration forestière plusieurs permis de coupe ont été accordés par les maires aux habitants qui avaient fait constater leurs besoins « par un homme de l’art ».

«  Parmi ces habitants il en est quelques-uns qui en se rendant dans la forêt de la Mourette pour y couper les arbres qui leur avait été distribués , n’en trouvant pas parmi ceux martelés qui fussent propres à l’œuvre qu’ils se proposaient d’en faire, se sont autorisés, ainsi que cela se pratiquait depuis longtemps, à en faire l’échange, c’est-à-dire à couper à la place de ceux qui étaient martelés, d’autres qui ne l’étaient pas mais qui pouvaient mieux leur servir dans leurs besoins. »

Au total ce sont 22 arbres non martelés qui ont été coupés, et le garde forestier s’en est aperçu avant le pauvre vieux Gilly résidant à plusieurs kilomètres de la forêt.

Un procès-verbal pour délit forestier est dressé à l’encontre de Gilly qui comparait devant le tribunal correctionnel de Barcelonnette, il risque l’emprisonnement et écope d’une amende exorbitante et de frais de justice qui ne feront qu’augmenter en appel à Digne : quelques 917, 32 F, puis un total de 1778,12 F. Les communes de Méolans et Revel sont à la fois débitrices en tant que solidaires de l’entrepreneur et bénéficiaires d’une partie de l’amende ! Une délibération du conseil municipal, qui qualifie cette situation d’absurde, demande la suspension des poursuites envers Gilly, mais elle est annulée pour cause d’illégalité. De nos jours on plaiderait responsable, mais non coupable, mais à l’époque il est traité comme un coupable : n’ayant pas prévenu à temps le garde forestier, il est considéré comme un complice …

En 1851 et 1852 il n’y aura plus de vente de coupe de bois aux habitants, le maire, Jean Jacques CLARIOND déclare au conseil :

« ..je redoute une difficulté, celle de trouver parmi les habitants de ces deux communes un entrepreneur solvable qui veuille se rendre responsable de tous les délits qui pourraient être commis dans cette forêt  pendant les 4 années que dureraient les coupes. Je présume fortement que personne ne veuille s’exposer à se faire ruiner pour le seul agrément de faire plaisir à ses voisins…De toute façon avec les arbres marqués, il n’y a pas de quoi construire la plus petite cabane. »

Il faudra attendre 7 ans pour la fin de l’histoire : Jean Pierre Gilly a été déclaré insolvable, la commune s’est vue obligée de payer 615, 48 F toujours réclamés par l’administration en 1858.

Jean Pierre Gilly se serait bien passé de tous ces tracas, pas étonnant qu’il ait eu besoin d’un peu de vacances : à voir ou revoir ses aventures de vieux grognard en goguette :

Deux grognards en goguette - Laverq.net

Généalogie : Jean Pierre Gilly de François Gilly et Rose Gilly né le 29/06/1781, décédé le 4/121861
Il a épousé Marguerite Françoise Reynaud le 4/08/1811.

Sources : délibérations de la commune de Méolans.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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