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Le nouvel ordre révolutionnaire

Publié par Marie Christine Duval le mardi 23 janvier 2024

La Convention bouleverse les us et coutumes locales.

Fin 1792 mise en place de l’état civil, puis du calendrier révolutionnaire fin 1793, les nouveaux officiers municipaux doivent s’adapter, non sans tâtonnements et bévues. Les actes de cette époque sont un peu brouillons presque partout ; ils nous réservent bien des surprises.

Pour illustrer ces vicissitudes, descendons un peu la « Routo », comme beaucoup de nos aïeux gavots. Ce chemin de la grande transhumance d’Arles passe par le col de Boullard sur la commune de Beaujeu, suivant l’ancienne route de Seyne-les-Alpes à Digne avant l’ouverture du col du Labouret.

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Boullard, hameau de Beaujeu © Geoparc/ UNESCO/AHP

Boullard avait sa petite église et un vicaire qui baptisait, mariait, enterrait et le consignait scrupuleusement . Fin 1792, son registre paroissial est clos comme partout.

Ici par le citoyen Vincens Auzet "mere" :

détail vue beaujeu fin paroisse

Le citoyen Segond devient « offesier public »...

bapteme Beaujeu 1793

Le hameau est loin de la maison commune de Beaujeu, à six kilomètres, alors on continue autant que possible à remplir dans les hameaux, tant bien que mal, des feuillets d’état civil fournis par le district. Les actes préimprimés n’arriveront qu’en 1798, il faut se débrouiller avec les nouvelles formules alors que l’écriture n’est pas une habitude courante. On marie encore dans l’église, difficile de le faire dehors, mais il ne fallait pas le noter ; on nomme aussi les parrains et marraines des enfants, après tout ce sont des témoins… (A Méolans on mariait dans la chapelle de la confrérie du Saint Esprit).

 Il ne doit pas s’agir de manifestation politique, mais bien d’incompétence, puisque les officiers de Beaujeu restent en fonction plusieurs années. Ils vont ainsi se perdre dans le nouveau calendrier révolutionnaire : an IV de la liberté, an second de la république française, 3ème année républicaine, « 1795 vieux stile »… les jours, les mois et le décompte des années changent, ils ont du mal à suivre, si bien que certains actes vont devoir être retoqués au niveau du district.

C’est ainsi que pour un jeune couple il faudra trois actes successifs pour qu’ils soient enfin mariés civilement ! On ne sait pas s’ils ont fêté trois fois leurs noces, mais en tout cas ils ont signé trois fois avec parents et témoins.

Jean Gaspard Lombard, de Verdaches, vient à Boullard épouser Marie Thérèse Lombard.

beaujeu mariage Lombard

Sur 2 pages du feuillet de  « Boulard succursale de Beaujeu » l’officier gribouille maladroitement : « L’an mil sept cent quatre vingt seize le deux semido l’an quatre de la république française une et indivisible dans la meson commune du lieu de Beaujeu (on ne serait donc pas à Boullard ?)… qui se son épousé en face de notre Sainte Mère l’église et on signé avec nous... le deux mesido l’an quatre de la république… »

Cet acte est barré et juste en dessous le mariage est entièrement reformulé par une plume élégante et assurée, avec un nouveau témoin Charles Bayle. Sans aucune référence religieuse, il contient toutes les formules républicaines au sujet des publications, consentements, parents, actes de naissance…tout le monde signe une deuxième fois. On date du 2 messidor an IV, un duodi jour de l’avoine, le lendemain de seigle et la veille d’oignon. Pour nous, avec internet, c’est vite converti : c’était le 20 juin 1796.

Il faut préciser que Charles Bayle est devenu ensuite Président du Canton du Vernet, avec diverses missions d’officier d’état civil, et d’importantes fonctions. On trouve sa plume et sa signature dans plusieurs registres de Beaujeu, d’abord comme « secrétaire ».

La machine administrative est bien longue à se mettre en place. Les actes de « succursale » vont être mal rattachés aux feuillets du chef-lieu, leur ordre chronologique n’est pas rigoureux et certains ne figureront pas dans la table décennale 1793/1803.

Le couple Lombard a-t-il rencontré quelques problèmes administratifs ?

On ne sait pas encore lesquels, mais 10 ans après ils furent obligés de repasser devant monsieur le Maire.

Le 21 décembre 1806 les voilà au chef-lieu avec parents et témoins, et avec leurs enfants nés entre temps, pour un mariage en bonne et due forme . Ce sera leur date officielle d’union. Cette fois pas de problème sur l’acte préimprimé. Publications, témoins, consentements et reconnaissance de deux enfants, tout est sans faute cette fois. Ils signent pour la troisième fois.

boullard maison
maison boullard jm besson

à Boullard au fil des siècles

Les Lombard auront de nombreux descendants, dont un petit-fils installé à Mariaud, qui a épousé l’une des dernières habitantes du hameau des Viels du Laverq, Marie Adèle Alix Barthélémy.

 Sources :  Jean Marie Besson, que nous remercions pour sa contribution. Et état civil de Beaujeu en ligne sur le site des Archives Départementales des Alpes de Haute Provence (vues 336 et 360 sur 597).

 

 

 

 

 

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