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Cassou

Publié par Lise Garnier le dimanche 25 octobre 2015

Lorsque ma vie a commencé il y avait déjà quelque temps que la sienne était passée, mais elle flottait dans le sourire si doux et le regard aimant berçant mes jours.

Cassou (2)

C'était un chien sympathique comme on en rencontre parfois, il avait pour habitude de suivre chaque pas d'une jeune maîtresse d'école sur le chemin qui l'emmenait vers ceux qu'elle appelait "mes enfants" tant son métier était sa joie.

Il entrait avec elle dans la petite salle de classe des Clarionds où l'on avait allumé le poêle pour qu'elle puisse faire chauffer la soupe que quelques kilomètres de marche matinale avaient rendue meilleure que n'importe quel petit déjeuner. Puis la journée commençait et il s'installait à ses pieds sous le grand bureau carré fermé sur trois côtés. Là il rêvait à son aise de troupeaux de moutons et d'amis à quatre pattes, peut-être comme les jeunes élèves qui délaissaient si sérieusement leur tâche par respect d'un bout de crayon.

Apprendre n'était pas chose facile entre la pâture et la moisson mais c'était une chose noble que l'on respectait par tradition et peut-être dans l'espérance toujours un peu folle de maîtriser la science ou les passions.

Il fut un jour peu ordinaire qui conduisit dans ce vallon un Inspecteur Primaire faisant le tour de sa circonscription.

La visite était annoncée, tous attendaient avec respect le "savoir" en personne venant les rencontrer. On avait averti les familles pour que les plus grands, qui parfois n'arrivaient en classe qu'au moment où les troupeaux rentrent à l'étable pour l'hiver, soient ce jour-là à leurs cahiers.

L'école ne devait pas compter un seul banc vide tant sa survie dépendait à la fois du nombre d'élèves et de sa capacité à faire respecter l'Education Nationale.

Tout le monde savait ce qu'il devait faire, sauf le chien. Comme à son habitude Cassou s'était mis à sa place sans bruit reconnaissant au moindre mouvement qui passait devant lui si bien que du fond de sa cachette il n'arrêta pas de grogner à ce pas étranger qui perturbait sa sieste.

Et parce qu'en ces montagnes la simplicité va de soi, nulle réprimande, nulle offense ne vint ternir ce jour en la joie qui derrière les manières les plus sages, les propos les plus courtois, n'en finissait pas de sautiller et de porter les cœurs en son pas. Chacun sentant au fond de soi que, finalement, le plus vrai et le plus sincère était celui qui ne se montrait pas.

C'était un temps où l'école accueillait tous ceux qui avaient envie d'apprendre quelque chose et la leçon venait parfois à l'improviste.

 

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